Se sentir vide. David VERGRIETE


Éditorial.
La question du rapport au vide est susceptible d’émerger lors d’une démarche thérapeutique. Elle concerne en premier chef le patient, qui chemine vers la résolution de sa problématique, mais aussi le thérapeute qui peut être touché dans sa condition humaine. Inévitablement, cette question influence le dénouement de la thérapie.



Enfant dans les escaliers (Biarritz). © Serge Nouchi
Avant d’aller plus loin, tâchons d’approcher ce qu’est le vide. Selon la définition, le vide serait absence de matière. A différencier par conséquent du néant qui lui est l’absence de tout. Cette distinction est significative puisque depuis la pensée taoïste jusqu’aux propositions de la physique quantique, on attribue au vide la disposition à révéler « quelque chose ».

Dans la pensée chinoise, l’homme possède en lui l’empreinte du vide originel et contiendrait en germe un potentiel de création, voire de transformation. Les physiciens, eux, associent au vide l’existence d’une infinitude de particules virtuelles susceptibles de devenir matière. Dans les deux approches, le vide est un espace contenant un projet en devenir.

C’est cette idée de « vide plein » qu’on pourrait appliquer aux individus et qui serait susceptible alors d’orienter notre lecture du processus thérapeutique. Comme dit le Tao, le vide est à la fois l’origine et la voie. Le vide en psychopathologie se décline de façon différenciée en ce qui concerne les effets générés sur les individus. Le processus de (re)construction inhérent au vide peut être inhibé, « figé », et dans ce cas la rencontre de l’individu avec le vide est souvent douloureuse.

Par exemple, il peut générer un sentiment de perte ou d’abandon dans la dépression, de l’inquiétude dans les troubles anxieux, ou encore faire apparaître des conduites compulsives dans les addictions. Et il faudrait développer bien davantage si nous envisagions d’évoquer le rapport au vide des troubles psychotiques. Reste à savoir comment dans la démarche d’accompagnement thérapeutique, patient et thérapeute peuvent conjointement en traverser les effets.

C’est ce que nous tâcherons de dérouler au travers des articles qui composent ce dossier thématique. Je remercie les trois auteurs que sont Sylvie Le Pelletier, Julien Betbèze et Dominique Megglé pour la qualité de leur contribution. Les articles qu’ils ont eu la gentillesse de rédiger et celui que j’ai modestement produit participent, je l’espère, à fournir un éclairage qui peut nous inspirer dans la pratique du soin. Je tiens aussi à exprimer ma gratitude auprès de Sophie Cohen qui a témoigné de son intérêt pour un sujet dont l’intitulé semble jouer de son invisibilité et qui cependant peut être déterminant pour appréhender la dynamique à l’oeuvre dans une démarche thérapeutique.

Questionner notre relation au vide est également pertinent dans un contexte sociétal qui fait la promotion de multiples formes de consommation. Remplir, ou se remplir de tout, de n’importe quoi, donnerait le sentiment d’exister, paraît-il, de compter, peut-être bien. Compter... pour qui, pour quoi ?

Lorsque Victor Hugo dit : « l’homme est un puits où le vide toujours recommence », peut-être pourrions-nous entendre que le dépouillement est un préalable en vue d’accueillir la nouveauté, et par conséquent la possibilité du changement. N’est-ce pas là l’essence même de la démarche thérapeutique ? Je vous souhaite une agréable et profitable lecture.

DAVID VERGRIETE Psychologue, pratique les thérapies brèves et l’hypnose au sein du service addictologie de la clinique de la Mitterie située à Lomme (59). Titulaire d’un DU Addictions comportementales Université Paris Sud, certifié HTSMA. Formateur au DU d’Hypnose médicale de la Faculté de médecine de Lille, enseigne également auprès de l’Espace du Possible à Tournai et de Formation Evolution Synergie à Avignon.

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Florent HAMON est Hypnothérapeute et Infirmier Anesthésiste. Formateur en Hypnose Médicale… En savoir plus sur cet auteur

Rédigé le 26/05/2020 à 00:27 | Lu 1887 fois | 0 commentaire(s) modifié le 22/09/2020
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