146 boulevard Haussmann, Maurice Soustiel, MED Editions
Il est rare que je parle d’un récit et voici que cette rubrique fait exception pour l’excellent livre de Maurice Soustiel. Maurice Soustiel pratique l’hypnose dans sa consultation à l’hôpital. Il me dit sans l’hypnose, ce livre n’aurait jamais vu le jour parce que penser le passé jusqu’à l’écrire est extrêmement thérapeutique. C’est son premier livre et il est très bien écrit.
Voici quelques extraits de nos échanges.
En quoi l’hypnose t’a aidé à écrire ce livre ? En quoi l’hypnose sert-elle l’écriture ?
Maurice Soustiel : L’hypnose n’a pas besoin de l’écriture mais l’écriture a besoin de l’hypnose. Ecrire c’est dire ce qui se refuse à être dit. Pour moi qui suis né après la guerre, écrire l’histoire de ma famille rescapée, donc cachée, est devenu une nécessité qui n’est pas une transmission familiale d’un vécu qui n’est pas le mien, mais la transmission d’un traumatisme familial qui est bien le mien. Léon Chertok écrit que « se cacher pendant la guerre c’est déjà résister », donc survivre à la Shoah n’est pas une honte ! Le même Chertok a écrit que l’hypnose est une forme de résistance dans le monde médical fort de ses certitudes... Alors oui, l’hypnose m’a aidé à écrire ce livre et m’a guéri de mes peurs.
Quelles peurs ?
M.S. : Chacune des séances d’hypnose en tant que soignant me ramène à ce traumatisme. Le prénom, le nom, l’identité, le parcours, et nous sommes déjà dans l’abandon et l’exil, la séparation et la dissimulation. L’hypnose nous offre cette capacité à endosser tant d’identités, à tout accepter pour ne pas renoncer. Aucune consultation médicale « classique » ne propose ce champ du possible en dehors de l’hypnose. Ecrire ce livre c’est traduire, à ma façon, la somme de toutes mes séances. Ja- mais je n’aurais pu imaginer que l’enseignement de François Roustang ou la lecture de Boris Cyrulnik allaient me faire au- tant de bien pour me rendre disponible aux autres. Enfin guéri de mes peurs, il me semblait naturel d’écrire ce processus à travers le vécu de mes parents.
Est-ce que l’hypnose t’a aidé au niveau des émotions, à mieux comprendre la complexité des choix dans ces temps tellement troublés ?
M.S. : L’hypnose telle que je la pratique, en une séance unique, nécessite de prendre tout en compte. Tout, c’est-à-dire toute l’actualité de l’instant, pas la présence dont le mot me dérange comme un truisme,mais le présent, l’instant présent c’est aujourd’hui que cela se passe, pas demain, non, aujourd’hui, dans l’actualité du jour, tel jour, telle date, telle heure. Prendre tout en compte tout en laissant la surprise du corps qui avance vers son destin. Comme à l’église où les stations du chemin de croix sont autant de haltes vers une progression. Pour progresser, il faut s’arrêter ! Et c’est aujourd’hui qu’on arrête : de fumer, de boire, d’avoir peur, de ruminer cette histoire impossible, etc. Comme le dit Charcot, « se résoudre à tout quitter ». Ce point de bascule qui fait qu’on entre physiquement dans le magasin d’antiquités de mon père, ou que l’on se convertit au christianisme ou à l’islam. Il suffit d’un geste...
Voici quelques extraits de nos échanges.
En quoi l’hypnose t’a aidé à écrire ce livre ? En quoi l’hypnose sert-elle l’écriture ?
Maurice Soustiel : L’hypnose n’a pas besoin de l’écriture mais l’écriture a besoin de l’hypnose. Ecrire c’est dire ce qui se refuse à être dit. Pour moi qui suis né après la guerre, écrire l’histoire de ma famille rescapée, donc cachée, est devenu une nécessité qui n’est pas une transmission familiale d’un vécu qui n’est pas le mien, mais la transmission d’un traumatisme familial qui est bien le mien. Léon Chertok écrit que « se cacher pendant la guerre c’est déjà résister », donc survivre à la Shoah n’est pas une honte ! Le même Chertok a écrit que l’hypnose est une forme de résistance dans le monde médical fort de ses certitudes... Alors oui, l’hypnose m’a aidé à écrire ce livre et m’a guéri de mes peurs.
Quelles peurs ?
M.S. : Chacune des séances d’hypnose en tant que soignant me ramène à ce traumatisme. Le prénom, le nom, l’identité, le parcours, et nous sommes déjà dans l’abandon et l’exil, la séparation et la dissimulation. L’hypnose nous offre cette capacité à endosser tant d’identités, à tout accepter pour ne pas renoncer. Aucune consultation médicale « classique » ne propose ce champ du possible en dehors de l’hypnose. Ecrire ce livre c’est traduire, à ma façon, la somme de toutes mes séances. Ja- mais je n’aurais pu imaginer que l’enseignement de François Roustang ou la lecture de Boris Cyrulnik allaient me faire au- tant de bien pour me rendre disponible aux autres. Enfin guéri de mes peurs, il me semblait naturel d’écrire ce processus à travers le vécu de mes parents.
Est-ce que l’hypnose t’a aidé au niveau des émotions, à mieux comprendre la complexité des choix dans ces temps tellement troublés ?
M.S. : L’hypnose telle que je la pratique, en une séance unique, nécessite de prendre tout en compte. Tout, c’est-à-dire toute l’actualité de l’instant, pas la présence dont le mot me dérange comme un truisme,mais le présent, l’instant présent c’est aujourd’hui que cela se passe, pas demain, non, aujourd’hui, dans l’actualité du jour, tel jour, telle date, telle heure. Prendre tout en compte tout en laissant la surprise du corps qui avance vers son destin. Comme à l’église où les stations du chemin de croix sont autant de haltes vers une progression. Pour progresser, il faut s’arrêter ! Et c’est aujourd’hui qu’on arrête : de fumer, de boire, d’avoir peur, de ruminer cette histoire impossible, etc. Comme le dit Charcot, « se résoudre à tout quitter ». Ce point de bascule qui fait qu’on entre physiquement dans le magasin d’antiquités de mon père, ou que l’on se convertit au christianisme ou à l’islam. Il suffit d’un geste...